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www.saintlouis-sucre.comL’utilisation de rampes pour épandre les eaux terreuses préserve la structure des sols. Un atout qui séduit les planteurs de la sucrerie d’Étrépagny.
La betterave est composée à 75 % d’eau : un élément clé du fonctionnement d’une sucrerie. Utilisée notamment pour laver les betteraves et extraire le sucre, elle est plusieurs fois recyclée pour limiter l’usage d’eau de forage. À Étrépagny, à l’issu du process, les eaux terreuses sont épandues sur les terres agricoles des planteurs. « Depuis l’arrivée des déterreurs à l’usine en 2003, la quantité de terre restituée est de moins en moins importante, explique Philippe Simonin, directeur betteravier à Étrépagny. Les eaux terreuses sont de plus en plus liquides. Certains agriculteurs hésitent à les réceptionner sur leurs parcelles de peur de déstructurer leur sol et de compliquer la reprise des terres au printemps. »
En conditions très humides, la mise en place de billons, pour épandre les eaux terreuses, peut effectivement impacter le sol. Voilà pourquoi depuis trois ans, la sucrerie teste une nouvelle pratique : l’épandage via des rampes. Une technique qui, au fil des campagnes, fait ses preuves. Elle séduit de plus en plus de planteurs. « Les premiers essais ont débuté en 2016, sur 5 % des surfaces se souvient Joël Duprey, responsable de l’épandage à Étrepagny. En 2017, 50 % des épandages ont été réalisés avec des rampes et pour 2018, ce chiffre est passé à 80 %. Cependant, dans des situations de parcelles en pente, la technique des billons reste la plus pertinente ».
En pratique, l’épandage par rampe consiste à déplacer un enrouleur dans la parcelle, comme pour l’irrigation. « La prestation est assurée en partenariat avec l’entreprise Galmel Prestagri, un professionnel de l’épandage avec qui nous avons travaillé pour parfaire la technique, précise Philippe Simonin. Ainsi, pour faciliter l’avancement de l’enrouleur au sec et limiter les zones boueuses, un chemin est créé, tous les 30 mètres (voir photo) pour isoler la machine des zones d’épandage ». La campagne 2017, exceptionnellement longue et pluvieuse, a nécessité d’autres améliorations. « La largeur des pneus de tous les engins a été augmentée pour améliorer la portance et limiter la dégradation des sols, poursuit Joël Duprey. De même, dans les parcelles les plus détrempées, nous avons testé l’utilisation d’un chenillard, plus simple à manier, et là encore, moins déstructurant pour le sol ». Étrepagny a d’ailleurs fait le choix, pour la campagne qui s’annonce, de réserver un chenillard... au cas où.
L’épandage des eaux terreuses s’accompagne systématiquement d’un conseil de fertilisation. Car ne l’oublions pas, cette matière, constituée essentiellement d’eau et de terre, contient également un peu d’azote et beaucoup de potasse. C’est un fertilisant à part entière. Après épandage, l’agriculteur reçoit une analyse pour ajuster son plan de fumure. À l’usine, des prélèvements sont réalisés quotidiennement (2 litres analysés toutes les 8 heures) pour quantifier l’azote et la potasse mais également mesurer le pH et le taux de matière sèche. La transparence sur la qualité des eaux permet un épandage en toute sécurité.
En moyenne, l’épandage des eaux terreuses sur une même parcelle revient tous les quatre ans. Le volume apporté est de 1000 m3/ha, soit un niveau de précipitations de 100 mm. Les épandages se font durant toute la campagne, du 15 septembre au 15 février mais le planning intègre bien entendu les rotations des planteurs. À Étrépagny, pour la campagne 2018, l’épandage est réalisé sur 430 ha.
La société Galmel Prestagri, équipée de deux enrouleurs et de deux rampes, participe aux épandages des eaux terreuses d’Étrepagny. Pour Michel Galmel, le gérant de l’entreprise, « l’utilisation de rampes pour épandre ces eaux est un net bon en avant technique. Avec l’allongement des campagnes, l’épandage se fait parfois dans des conditions climatiques compliquées. La technique des billons utilisée jusque-là impactait la structure du sol et compliquait, voire rendait impossible, la reprise au printemps. Pour un agriculteur, le sol est un élément important de la réussite de sa culture. Le préserver est un impératif. L’utilisation de rampes, testée depuis quelques années chez les planteurs d’Étrepagny, a nécessité des aménagements pour limiter l’impact sur la structure du sol et ajuster au mieux les quantités d’eau épandues : pneus larges basse pression, installation de débitmètres sur les enrouleurs, utilisation d’un surpresseur pour accroitre la qualité du débit sur l’enrouleur... Des améliorations qui résultent d’une concertation entre les planteurs, l’usine et nous, l’entreprise d’épandage ».
Installé depuis un an et demi sur l’exploitation familiale, Guillaume André cultive 300 ha dont 30 de betteraves. Ses parcelles reçoivent les eaux terreuses de la sucrerie d’Etrepagny depuis une vingtaine d’années. « Cet apport enrichit les sols en matière organique et potasse tout en apportant un peu de limons. Sur les terres superficielles, c’est un réel plus, constate-t-il. Par choix ou par contraintes, les deux techniques d’épandage sont utilisées chez moi : les rampes sur les parcelles plates, les billons pour les terrains en pente. Les années humides, les méthodes actuelles restent à améliorer même si la rampe semble conserver son avantage sur la structure du sol. Des analyses qualitatives des eaux et des sols accompagnent l’épandage pour connaitre avec précision les apports et leurs impacts. L’épandage d’eaux terreuses nécessite ensuite un suivi rigoureux du désherbage car trop souvent, les eaux sont riches... d’adventices. C’est à mon sens, le principal souci de cette pratique. Un sujet sur lequel nous échangeons régulièrement avec l’instance de dialogue mise en place entre la sucrerie et l’association des eaux terreuses du Vexin. Cette démarche d’amélioration, d’écoute, de progrès, est très appréciable car nous cherchons ensemble les points à améliorer et les solutions à mettre en place. »