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Face au retrait progressif des herbicides et à la pression sociétale, Ludovic Dubuc, inspecteur de culture en Picardie, choisit d’explorer une voie alternative pour désherber les betteraves. L’objectif de son mémoire est donc d’identifier des solutions efficaces et compatibles avec les contraintes environnementales, agronomiques et économiques.

« Dans ce cadre, le désherbage mécanique a toute sa place, affirme Ludovic Dubuc. Cependant, il nécessite de s’adapter à chaque situation agronomique et son efficacité doit être évaluée. » Le chénopode blanc , problématique à détruire, concentre son attention dans son rapport.  

Le chénopode blanc engendre de lourdes pertes de rendement. En effet, un seul plant par mètre carré peut coûter jusqu’à 5 tonnes de betteraves à l’hectare. De plus, la plante est très prolifique. « S’il atteint 1 mètre, un pied de chénopode peut produire jusqu’à 5 000 graines », indique l’inspecteur de culture.

Enfin, à la récolte et au stockage, les désordres techniques sont nombreux : canaux d’arrachage bouchés, matériel bloqué, surchauffe des silos. « Outre les pertes de rendement, ce sont des pannes et du temps perdu », complète-t-il. Sans compter les risques de blocage des peignes au lavoir de l’usine.

Binage

Le binage ressort comme le levier mécanique le plus pertinent pour contrôler les adventices. « Cet outil présente une bonne efficacité sur l’inter-rang à condition d’intervenir avant le stade 4 feuilles pour les dicotylédones et 2 feuilles pour les graminées. Toutefois, il ne permet pas de désherber le rang », explique Ludovic Dubuc.
Pour étayer son propos, l’inspecteur de culture s’appuie sur deux essais menés en 2023 par Saint Louis Sucre. Deux désherbages chimiques (T2 et T4) sur quatre ont été remplacés par deux binages. Un gain de rendement de 6,5 t/ha est obtenu avec le désherbage mixte associant la bineuse. En effet, le binage favorise la minéralisation de l’azote, lequel sera plus rapidement disponible pour la plante.  

Cependant, un binage demande au moins sept jours sans pluie pour garantir l’efficacité sur les adventices. Le facteur temps est également un frein puisque l’intervention mécanique est plus longue qu’un passage avec un pulvérisateur. 
Enfin, remplacer deux désherbages chimiques par deux binages peut laisser des mauvaises herbes à proximité des betteraves.

Écimage

L’écimage est une autre alternative qui s’emploie plutôt en rattrapage. Dans ce cas, l'écimeuse coupe ou déracine les chénopodes dépassant de la culture, facilitant les opérations suivantes. Les plantes sont récupérées ou laissées au sol. Un risque de dissémination des graines persiste si l'intervention est tardive.

Rotation des cultures

L’alternance des cultures d’hiver et de printemps perturbe le cycle des adventices inféodées à cette plante. En complément, l’introduction dans la rotation d’espèces à fort recouvrement freine les levées. « Si la modification de la rotation n’est pas possible : l’interculture doit alors devenir le moment privilégié de lutte contre les adventices », mentionne Ludovic Dubuc.

Le retard de la date de semis de betterave est aussi une piste, à manier avec précaution. Cette technique peut accélérer la couverture du rang à un moment propice à la levée des adventices. Mais si le semis est trop tardif, la levée des betteraves peut être compromise, avec un impact direct sur le rendement.

Innovations prometteuses

Côté agroéquipements, les bineuses intelligentes avec caméras, le désherbage par laser, ou encore les robots comme le Farmdroid FD20 promettent des avancées majeures. Enfin, les outils numériques de prédiction du risque météo aident l’agriculteur à planifier chaque opération au meilleur moment.

Recommandations

Ludovic Dubuc incite les planteurs à combiner les leviers et à s’appuyer davantage sur le désherbage mécanique. « Il ne remplace pas entièrement le chimique mais il aide à retrouver de la maîtrise », conclut-il. À condition d’y associer une réflexion agronomique solide à l’échelle de la rotation.