Menu

Adapter l’agriculture au changement climatique consiste à agir sur tous les fronts : celui de la recherche variétale, celui des pratiques culturales et celui de la résilience des sols. Dans ce dernier cas, l’objectif est d’améliorer la capacité de rétention hydrique du sol ainsi que sa fertilité. Comment ? « En augmentant le taux de matière organique et la microporosité du sol », partage Paul Robert, directeur de Novalis Terra.

Avoir un sol avec une bonne porosité et de la matière organique

Levier important de la gestion de la ressource en eau, la matière organique (MO) retient 5 à 6 fois son poids en eau. Elle est surtout au centre de l’équilibre physique, chimique et biologique des sols. « En un mot, c’est la clé de la bonne santé d’un sol », complète Paul Robert.
La matière organique donne de la cohésion entre les agrégats et limite les défauts de structure. La porosité fait circuler l’eau et l’air.
« Pour maintenir la porosité, on recherche un ratio matière organique sur argile supérieur à 17 %, souligne l’agronome. Ainsi, pour un sol limoneux et argileux avec un taux d’argile de 15 %, celui en matière organique doit être de 2,5 %. »

Paul Robert, directeur de Novalis Terra

« La hausse du taux de matière organique peut être obtenue en combinant des pratiques culturales comme la restitution des résidus, le choix des cultures et la limitation de l’intensité du travail de sol. »

Les couverts végétaux pour un apport rapide en matière organique

Les couverts végétaux sont un levier puissant pour entretenir la matière organique du sol. Des couverts avec 5 tonnes de matière sèche/ha génèrent environ 1,2 t/ha de matière organique stable (humus). Cet apport équivaut à 7 t/ha de paille de blé. « Si pour relever le taux de matière organique, nous cherchons du carbone, attention toutefois à maintenir un rapport C/N* des couverts végétaux bas », prévient Paul Robert. Comment y parvenir ? « En densifiant les mélanges avec des légumineuses et en détruisant les couverts avant la floraison, l’augmentation du C/N est évitée, conseille-t-il. Ainsi, nous obtenons une évolution rapide et bénéfique de la MO pour la culture suivante. »

*voir encadré en bas de l'article

Les racines des couverts végétaux augmentent la microporosité

Dans un système betteravier, en combinant un maximum de facteurs tels que la réduction du travail du sol, la restitution des résidus et les couverts végétaux, on peut augmenter la teneur en matière organique des sols d’environ 0,1 % par an. Si l’impact des pratiques culturales sur la hausse de la teneur en MO est lent, celui d’un couvert sur l’amélioration de la microporosité peut être très rapide.

Très fine, avec des espaces d’un diamètre inférieur à 0,08 mm, cette porosité joue le rôle de réservoir en eau en conditions de sécheresse. « Le meilleur moyen d’accroître la microporosité du sol est d’obtenir un chevelu dense de racines vivantes en interculture, conseille Paul Robert. Ce chevelu maintient la structure du sol et nourrit les micro-organismes, architectes de ces microstructures. »

Ainsi, par ce mécanisme, en deux ou trois ans les sols augmentent significativement leur capacité de rétention en eau. Pour bénéficier d’un effet optimum, les couverts sont semés denses (+ de 300 g/m2) et tôt, dès la récolte du précédent, ou détruits plus tard, six semaines avant le semis de la culture.

Sécuriser la capacité de rétention en eau

Reste à préserver cette microporosité. Cet objectif s’obtient en maintenant la couverture végétale des sols et en modifiant les habitudes de travail du sol.

L’impact d’un travail de sol est déterminé par sa profondeur, sa vitesse, la surface de sol travaillée et la perturbation générée par l’outil. « Le recours au non labour, sans outil animé (strip-till), préserve l’état structural des sols. Cependant, ces pratiques nécessitent de l’investissement et un savoir-faire, complète Paul Robert. L’impact du travail de sol peut être considérablement limité sans changer de matériel en jouant sur deux paramètres facilement ajustables : la profondeur de travail de sol et la vitesse de travail. Si on reste sur un labour, mieux vaut ne pas dépasser 6 km/heure. »

Les outils animés possèdent un fort coefficient de perturbation et dégradent aussi la microporosité. Néanmoins pour la betterave, un bon contact entre la graine et le sol reste nécessaire. « Dans ce cadre, avec les outils animés, le lit de semence est affiné sur 3 cm au lieu de 10 cm, surtout en terre argileuse, ajoute Paul Robert. L’utilisation doit être chirurgicale. » En non-labour, les outils à dents ou animés travaillent la ligne de semis sur 3 à 4 cm maximum.