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Les inspecteurs de culture se sont relayés sur le stand du PNRI installé pendant le salon Betteravenir les 25 et 26 octobre pour répondre à toutes les questions des visiteurs. À celle souvent entendue : « Est-ce que cela marche ? », difficile pour les experts en agronomie d’annoncer des niveaux d’efficacité. D’abord parce que les projets présentés lors de ces journées sont toujours en grande majorité à l’étude: « Nous devons rester prudents et attendre la fin des expérimentations », confie Ophélie Bolingue, responsable agronomique Saint Louis Sucre, encadrant pour l’entreprise les essais du PNRI. Ensuite, parce que ce plan augure une autre façon de protéger la betterave : « Le raisonnement qui consiste à mettre une seule solution face à une problématique bioagresseur ne fonctionne pas, ajoute-t-elle. La stratégie qui se dessine repose sur une combinaison de leviers agronomiques. La deuxième phase du PNRI doit accélérer l’élaboration des itinéraires techniques intégrant les solutions les plus efficaces. »

Gestion des réservoirs viraux, des pratiques déjà réalisables

L’un des projets du PNRI réside dans l’identification des plantes hôtes où se multiplient les virus et les pucerons afin de réduire le potentiel infectieux.

La racine de betterave ressort comme le foyer le plus facile à gérer. « Nous savons que les repousses de betteraves peuvent être contaminées par les virus, explique Jean-Baptiste Leroy, inspecteur de culture. Un désherbage efficace dans le blé suivant la betterave élimine ce foyer. » Les chercheurs de l’Inrae ont même détecté la présence de virus dans les betteraves poussant sur les cordons de déterrage. La recommandation est d’enfouir tous les résidus de racines présents dans la parcelle et de retourner les andains en période de gel ou par temps sec. Le travail d’enquête se poursuit sur d’autres espèces (pommes de terre, colza, radis, phacélie…) et sur les adventices. Néanmoins, vouloir tous les gérer se révèle une stratégie très complexe.

Jean-Baptiste Leroy, inspecteur de culture.
Jean-Baptiste Leroy, inspecteur de culture.

Variétés tolérantes aux virus de la jaunisse

Les variétés de betteraves tolérantes ou résistantes à la jaunisse sont très attendues par les planteurs. La réponse génétique s’améliore au fil des années.
« Un compromis est à trouver entre le rendement et la tolérance à la jaunisse, estime Henry Wattel, inspecteur de culture. Cette voie génétique devra être complétée par d’autres pratiques culturales y compris une protection insecticide ». Des expérimentations auxquelles participe Saint Louis Sucre ont été menées en 2023 dans le cadre du partenariat SAS-ITB. Programmées en dehors du PNRI, elles évaluent le comportement de variétés de betteraves inoculées par les virus de la jaunisse.

Henry Wattel, inspecteur de culture Saint Louis Sucre et Christian Heckeur, CEO de IF-Tech, société spécialisée dans les solutions de biocontrôle et qui élève les chrysopes.
Henry Wattel, inspecteur de culture Saint Louis Sucre et Christian Heckeur, CEO de IF-Tech, société spécialisée dans les solutions de biocontrôle et qui élève les chrysopes.

Effet de la paraffine à confirmer

L’huile de paraffine fait partie des deux solutions aphicides de biocontrôle qui ont donné les meilleurs résultats dans les essais sous serre. Saint Louis Sucre a expérimenté ce produit en plein champ. « Entre une bande de betteraves protégées avec deux passages d’insecticides, une deuxième bande avec deux applications de paraffine et une troisième recevant l’insecticide et la paraffine, nous n’avons pas relevé de différence visuelle », explique Henry Wattel. Même remarque pour l’essai effectué avec le lycée agricole du Neubourg et suivi par Edwige Delcour, inspecteur de culture : « En comparaison avec un programme insecticide Teppeki puis Movento, nous avons expérimenté différentes combinaisons de la paraffine. Elle a été appliquée pure au stade cotylédon de la betterave ou lorsque le seuil pucerons est atteint avec un programme en quatre applications. Il faut renouveler l’essai en grandeur nature avec une forte pression de pucerons pour mieux mesurer l’effet de cette solution. »

Edwige Delcour, inspecteur de culture.
Edwige Delcour, inspecteur de culture.

Plantes compagnes : essais avec l’orge et l’avoine

En perturbant les pucerons et en créant une barrière physique, l’avoine rude et l’orge complètent la panoplie des outils limitant la pression des pucerons en début de cycle de la betterave. Concurrentes avec la betterave, ces plantes de services sont à éliminer avant le stade 6 feuilles.

Saint Louis Sucre a piloté un essai féveroles sur la ferme d’Étrépagny. Avec une faible pression pucerons cette année sur la zone, le rôle des féveroles n’est pas significatif et reste à confirmer.

Autres solutions de biocontrôle

L’autre produit de biocontrôle retenu dans le PNRI est composé du micro-organisme Lecanicillium muscarium. Il élimine jusqu’à 40 % des pucerons en moyenne 15 jours après le traitement. Paraffine et Lecanicillium ne sont pas homologués sur les betteraves sucrières.

Un essai mené par Agriodor, société spécialisée dans les médiateurs chimiques à base d’odeurs, a été réalisé chez une productrice de betteraves Saint Louis Sucre. Des granulés composés d’allomones ont été épandus sur les betteraves au stade 2 feuilles. Leur rémanence est de 28 jours. Ces parfums brouillent les messages perçus par les pucerons et perturbent leur développement. Ils permettent une économie de passage d’insecticides en cas d’année à faible pression des pucerons comme c’est le cas en 2023.

Les granulés composés d’allomones créés par la société Agriodor s’appliquent avec un épandeur centrifuge.
Les granulés composés d’allomones créés par la société Agriodor s’appliquent avec un épandeur centrifuge.

Favoriser la prédation naturelle

Des fermes pilotes de Saint Louis Sucre ont semé des bandes fleuries pluriannuelles. Elles font partie du projet Infrastructures agroécologiques (IAE) du PNRI. Ces bandes hébergent notamment des carabes, des syrphes, des coccinelles dont les larves se nourrissent de pucerons. Des lâchers d’insectes auxiliaires viennent en renfort de ces prédateurs naturels. Présente sur le stand du PNRI, la société IF-Tech, spécialisée dans les solutions de biocontrôle et localisée à Pont-du-Cé (49), explique obtenir de bons résultats avec les larves de chrysopes. Les œufs sont positionnés au cœur des betteraves à l’aide du matériel de précision DPS 12 expérimenté avec l’ITB.

Les œufs de chrysopes sont appliqués avec une poudre à hauteur de 20 à 40 œufs par m<sup>2</sup> à l’aide d’un matériel de précision DPS 12.
Les œufs de chrysopes sont appliqués avec une poudre à hauteur de 20 à 40 œufs par m2 à l’aide d’un matériel de précision DPS 12.

Modélisation de la pression des pucerons

Inspiré d’un modèle anglais, évolutif, l’outil de modélisation de l’évolution de la population de pucerons développé par l’ITB met en alerte sur la date d’arrivée des premiers vols et sur le niveau de pucerons. « Néanmoins, il ne remplace pas le suivi régulier des parcelles pour repérer la présence des pucerons aptères, ajoute Jean-Baptiste Leroy. Actuellement la seule solution est d’intervenir tôt avec un insecticide foliaire dès que le seuil de risque est atteint. »

SAINT LOUIS SUCRE EST AGRÉÉ POUR LE CONSEIL À L’UTILISATION DES PRODUITS PHYTOPHARMACEUTIQUES (N° HN00104)